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L'affaire Mennesson Labassée : la fin d'une longue épopée judiciaire relative à la gestation

La GPA, c'est quoi ?



La GPA ou gestation pour autrui, est une technique de procréation médicalement assistée,

consistant pour une femme, qu'on qualifie de « mère porteuse » à porter l'enfant d'un couple afin que ce dernier se développe dans son utérus.


Ainsi, après la naissance, la mère porteuse abandonne tout droit sur l'enfant qu'elle a porté, au bénéfice des membres du couple, dénommés « père et mère d'intention ». C'est pour cette raison que certains couples français désireux d'avoir un enfant, mais qui n'ont pas cette possibilité naturellement, se tournent alors vers la GPA.


Cependant, bien que cette technique soit légale dans quelques pays étrangers, les conventions de GPA restent interdites en France, conformément à l'article 16-7 du Code Civil. Cette prescription conduit les couples à partir dans un pays autorisant une telle pratique pour ensuite solliciter la transcription sur les actes d'état civil français du père et de la mère d'intention.

« Mater semper certa est » (La maternité est toujours certaine)

C'est dans cette situation juridique que se trouvaient les parents de deux jumelles nées en 2000 d'une GPA aux Etats-Unis. En effet, sur leurs actes de naissance américains étaient inscrits leur père biologique et leur mère d'intention, ce qui avait été retranscrit sur leur état civil français.


Cependant, le 16 mai 2003, le Procureur de la République intentait une procédure d'annulation pour fraude à la loi devant le Tribunal de Grande Instance de Créteil. Par un arrêt du 18 mars 2010, la Cour d'Appel de Paris, statuant sur renvoi après cassation, décidait finalement de l'annulation de cette transcription. Puis, par un arrêt du 6 avril 2011, la Cour de cassation confirmait l'interdiction de la transcription de ces actes de naissance. Les parents ont alors saisi la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH), et par ses deux célèbres arrêts Mennesson et Labassée du 26 juin 2014, cette dernière a condamné la France, considérant que cette absence de transcription portait atteinte à la vie privée des deux enfants, constituant une violation de l'article 8 de la CESDH.


Contrainte à réviser sa jurisprudence, et suite à plusieurs arrêts, la Cour de cassation a finalement autorisé la transcription du père d'intention, mais celle de la mère d'intention s'avérait plus délicate car, n'ayant pas accouché de l'enfant, elle ne correspondait pas, selon elle, à la « réalité biologique ». Néanmoins, il restait à la mère d'intention la possibilité d'adopter l'enfant de son conjoint.


Dans un avis consultatif rendu le 10 avril 2019, en réponse à la Cour de cassation, la CEDH a affirmé que la filiation entre l'enfant né d'une GPA et la mère d'intention devait être établi, mais que les Etats restaient libres de choisir le moyen légal leur convenant pour y parvenir.


Ainsi, par cette réponse, la CEDH ne contraignait pas la Cour de cassation à changer sa solution, l'adoption restant envisageable pour la mère d'intention au regard de la liberté laissée aux Etats. En effet, la seule injonction de la CEDH était de reconnaître le lien de filiation de la mère, peu importe le moyen favorisé par les Etats.


L'arrêt de l'Assemblée Plénière de la Cour de cassation du 4 octobre 2019, la consécration de 17 années de saga judiciaire.

Dans cet arrêt, la Cour de cassation admet la validité de la transcription des actes de naissances comportant le nom du père et de la mère d'intention. Ainsi, elle rompt avec sa jurisprudence antérieure et l'article 47 du Code civil, sur le fondement duquel la transcription n'était concevable que pour des actes conformes à la « réalité biologique ».

Pourquoi ce revirement de jurisprudence ?

Aujourd'hui, les deux enfants sont majeurs. Ainsi, une adoption plénière n'aurait pas pu être envisageable au regard de l'important délai d'attente nécessité par ce type de procédure d'une part et de l'atteinte disproportionnée à la vie privée des enfants que cela engendrerait d'autre part.

En outre, cela aurait davantage étendu la procédure, qui se prolongeait déjà depuis de très longues années. Ainsi, cette solution doit donc être considérée comme une décision rendue in concreto, c'est-à-dire, au regard des circonstances particulières de l'espèce.


Néanmoins, dans deux arrêts du 18 décembre 2019, la Cour de cassation a jugé en faveur d'une transcription intégrale des actes de naissance d'enfants nés d'une GPA aux Etats-Unis à l'état civil français, estimant qu' "une GPA légalement faite à l'étranger ne fait pas, à elle seule, obstacle à la transcription de l'acte de naissance des enfants désignant le père biologique et le père d'intention". Ainsi, elle opère un revirement de jurisprudence, qui semble être l'amorce d'une véritable évolution en la matière, ce que l'avenir infirmera ou confirmera.

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